Le député Bloche
Le député Patrick Bloche ouvre le débat

Patrick Bloche rappelle la « Semaine sanglante  », les jugements prononcés de manière expéditive et les 10 à 20 000 exécutions sommaires. Puis après l’écrasement de la Commune par les armes, l’internement de 43 522 communards et la condamnation de 9780 d’entre eux par des conseils de guerre à des peines très lourdes. Comme le dira Louise Michel, quelques années après son retour du bagne de Nouvelle-Calédonie : «  du côté de la Commune, les victimes furent sans nom et sans nombre ».

L’amnistie partielle, le 3 mars 1879, puis l’amnistie générale, le 11 juillet 1880, ont seulement permis de libérer les communards encore en vie, mais en rejetant tous les autres dans l’oubli. «  Le temps est enfin venu de rendre justice à toutes les victimes ».

Il revient enfin sur les causes de la Commune : la guerre et la défaite, le refus de la capitulation, et surtout la grande cause de la défense de la République. « Le moment est donc venu que nous rendions honneur et dignité à ces milliers de femmes et d’hommes qui n’eurent que le tort, outre le fait d’être le peuple industrieux de Paris, de croire en la possibilité de bâtir une République sociale ».

Nous passerons sur les orateurs de la droite et de l’extrême-droite qui se signalèrent par leurs propos outranciers, parfois à la limite de l’insulte.

Les député.e.s des différents groupes de gauche — socialistes, communistes, radicaux et républicains — se succédèrent ensuite à la tribune pour appuyer la résolution. De leurs interventions nous retiendrons quelques phrases :

« Les communards sont morts pour leurs idées. Pour leur rendre pleinement justice, il est donc indispensable de les réhabiliter non seulement en tant que victimes de la répression, mais également en tant que promoteurs d’une forme de société libre, égalitaire et fraternelle  ». (Jean-Jacques Candelier, PCF, Nord).

 

« Si nous devons aujourd’hui rendre justice aux victimes de la répression, ce n’est pas pour réécrire l’histoire ou la justifier, c’est parce que les communards furent des éclaireurs. S’ils ont été fauchés par la mitraille de Thiers et des Versaillais, c’est parce qu’ils ont voulu défendre jusqu’à la mort des principes qui font aujourd’hui partie de notre identité républicaine ». (Yves Durand, PS, Nord).

 

« Pour les habitants de l’Est parisien, dont je fais partie, la Commune n’est pas morte : chaque année, nous nous rendons au mur des Fédérés pour évoquer le souvenir des communards, leur fin tragique sur les dernières barricades, mais aussi l’œuvre réalisée par la
Commune en peu de temps, dont la modernité nous surprend toujours… Le souvenir des communards n’est pas seulement présent au mur des Fédérés et au cimetière qui leur est consacré sur l’île des Pins, il est aussi présent dans les écrits de Louise Michel sur la culture kanak  » (George Pau-Langevin, PS, Paris XXe).

Le moment le plus émouvant est peut-être celui où le député Hervé Féron (PS, Meurthe-et- Moselle) lit à la tribune de l’Assemblée le poème d’Eugène Pottier, Elle n’est pas morte, et termine avec les paroles de la chanson de Jean Édouard : 

« À dix contre deux cents, les révolutionnaires !
Les derniers Fédérés contre un mur sont tombés,
Ne murmurant qu’un mot, le mot : Fraternité.
Versaillais, Versaillais,
Vous avez fusillé le cœur d’une révolution,
Vous l’avez jeté en prison,
Mais il reste à Paris, l’esprit des insurgés.  »

Patrice Bloche et les Amis de la Commune
Patrick Bloche et les Amis de la Commune

Après l’intervention du secrétaire d’État Jean-Marie Le Guen, qui salue au nom du gouvernement « la présente initiative de résolution qui valorise la transmission de la mémoire », la proposition de résolution est mise au vote et adoptée avec les voix de tous les groupes de gauche, socialiste, communiste, radical de gauche et républicain.

« L’Assemblée nationale estime qu’il est temps de prendre en compte les travaux historiques ayant établi les faits dans la répression de la Commune de Paris. Juge nécessaire que soient mieux connues et diffusées les valeurs républicaines portées par les acteurs de la Commune de Paris. Souhaite que la République rende honneur et dignité à ces femmes et ces hommes qui ont combattu pour la liberté au prix d’exécutions sommaires et de condamnations iniques. Proclame la réhabilitation des victimes de la répression de la Commune de Paris de 1871  ».

Le lendemain, la presse (Le MondeL’HumanitéLibérationLa Croix, et jusqu’au Figaro) et les réseaux sociaux se sont largement faits l’écho de cette réhabilitation.

Cent quarante-cinq ans après les faits, cette reconnaissance de la Commune par la République est l’aboutissement d’un long combat, mené depuis des années par notre association, soutenu par de nombreuses personnalités et rejoint par les parlementaires de gauche.

Cela ne marque pas pour autant la fin de notre action. Notre programme est inscrit dans cette phrase de la résolution : « que soient mieux connues et diffusées les valeurs républicaines portées par les acteurs de la Commune de Paris ». Vaste programme en effet ! Qui passe par l’école, par le travail de recherche, par la création de lieux de mémoire… et par la traduction dans le champ politique des idées portées par la Commune.

MICHEL PUZELAT

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