La Garde nationale de Paris, créée pendant la Révolution de 1789, a joué un rôle considérable pendant la Commune de Paris de 1871.

Début juillet 1789, les États généraux convoqués par le roi Louis XVI à Versailles viennent de se transformer en Assemblée constituante pour mettre fin à la monarchie absolue et construire une société de liberté, d’égalité et de fraternité.

Défense de Paris 1870-1871 : Défense de Paris - Garde nationale 97e Bataillon, Commandant Gaudet - Photographie André-Adolphe-Eugène Disdéri - 1871 (source : © Musée Carnavalet – Histoire de Paris)
1870-1871 : Défense de Paris - Garde nationale 97e Bataillon, Commandant Gaudet - Photographie André-Adolphe-Eugène Disdéri - 1871 (source : © Musée Carnavalet – Histoire de Paris)

 

À Paris, les notables bourgeois ont créé la première Commune de Paris pour administrer la ville. Ils se sont dotés d’une milice pour se protéger contre les troubles qui accompagnent les débuts de la Révolution. Cette force armée participera le 14 juillet à la prise de la Bastille.

Elle sera nommée Garde nationale et étendue à toutes les moyennes et grandes villes du pays par le décret du 12 juin 1790.

À l’origine, la Garde nationale est recrutée parmi les citoyens aisés dits «  actifs  », ainsi nommés parce qu’ils paient un impôt égal à trois journées de travail. Compte tenu de ce mode de recrutement, la Garde nationale est plutôt de tendance modérée. À partir de 1791, elle est influencée par les clubs révolutionnaires sensibles aux revendications populaires. Elle est à la pointe de l’insurrection qui renverse la monarchie en 1792 et proclame la République.

La première Commune de Paris, jugée par les Thermidoriens trop sensibles aux revendications populaires, est supprimée par le décret du 14 fructidor an II (31 août 1794).

Cependant, les gardes nationales, à Paris comme en province, perdureront pendant les régimes qui suivent la Première République : Consulat, Premier et Second Empires, Restauration de 1815, Monarchie de juillet en 1830, Deuxième République en 1848.

 Barricade de la rue de la Roquette, place de la Bastille le 18 mars 1871 - Photo anonyme (source : © Musée Carnavalet – Histoire de Paris)
Barricade de la rue de la Roquette, place de la Bastille le 18 mars 1871 - Photo anonyme (source : © Musée Carnavalet – Histoire de Paris)

La Garde nationale en 1870 et 1871

Pendant le Second Empire, la Garde nationale parisienne est peu active. Elle est réduite à 14.000 hommes et 60 bataillons. Après la déclaration de guerre à la Prusse fin juillet 1870, Napoléon III décide de doubler ses effectifs, mais le recrutement est lent parmi la population bourgeoise de la capitale.

Le renforcement s’accélère après les revers militaires et l’encerclement de Paris par les Prussiens. Fin septembre 1870, 250 bataillons sont formés et 300 000 hommes mobilisés. Une solde de trente sous par jour est accordée aux gardes nécessiteux, de plus en plus nombreux à cause du chômage consécutif au ralentissement de l’activité industrielle. La Garde nationale devient une milice populaire et républicaine qui s’oppose de plus en plus au Gouvernement (dit) de Défense nationale.
C’est le peuple en armes.

Composition et fonctionnement

La Garde nationale parisienne est composée de vingt légions, une par arrondissement. Chaque légion compte plusieurs bataillons ; leur nombre varie en fonction de la population de l’arrondissement. En septembre 1870, la Garde nationale parisienne est composée de 234 bataillons. Chaque compagnie compte environ 125 hommes. Les bataillons sont formés de quatre compagnies de marche (ou de guerre) et de quatre compagnies sédentaires. Les compagnies de guerre sont composées de volontaires et des gardes les plus jeunes ayant peu ou pas d’enfants. Les gardes des compagnies sédentaires restent à leur domicile. Un point de ralliement est fixé dans chaque quartier pour les besoins de leur service. Les gardes nationaux des compagnies de marche et sédentaires sont donc très proches des populations qu’ils représentent. Des bataillons spéciaux sont recrutés dans les administrations et services publics : Poste et télégraphes, Finances, Octroi, Banque de France, Chemins de Fer, etc.

La loi du 2 septembre 1870, confirmée par la circulaire du 6 septembre, organisait l’élection des officiers, sous-officiers et caporaux par les gardes nationaux de leur compagnie. Les officiers des compagnies de guerre élisaient leur chef de bataillon.

Ce mode de désignation des cadres aboutit à l’élection de citoyens actifs dans les organisations populaires : clubs, chambres syndicales, sections de l’Internationale.

Le siège de paris par les prussiens

Garde nationale sédentaire
Types de la Garde nationale 1870 - Régamey Guillaume et Félix (source : © Musée Carnavalet – Histoire de Paris)

Le gouvernement de défense nationale, installé à l’Hôtel de Ville, se méfie de la Garde nationale. Trochu, général bonapartiste, choisi comme gouverneur de Paris et chef du Gouvernement provisoire, les engage dans des sorties mal préparées dont l’objectif réel est de calmer leur ardeur patriotique et révolutionnaire en faisant des saignées dans leurs rangs. C’est le cas des sorties de Champigny, de Montretout et de Buzenval.

Le reste du temps, l’inactivité des gardes nationaux les incite à participer aux réunions des clubs, des sections de l’Internationale, des comités de vigilance d’arrondissement, fédérés depuis le 5 septembre 1870 dans le Comité central républicain des vingt arrondissements, lequel appelle à la création d’une Commune de Paris.

Le gouvernement capitule devant les Prussiens et signe un armistice le 28 janvier 1871. La Garde nationale hostile à la capitulation va s’organiser pour défendre la République mise en péril par la majorité monarchiste de l’Assemblée élue le 8 février 1871 et qui siège à Bordeaux.

Le Comité central

Le 15 février 1871, les délégués de dix-huit légions de la Garde nationale se réunissent au Tivoli-Vauxhall, une salle de réunions républicaines située dans le Xe arrondissement, près de l’actuelle place de la République. Ils décident de créer un Comité central de la Garde nationale pour coordonner l’action des 20 légions d’arrondissements. Ils chargent une commission provisoire d’en élaborer les statuts. Le 15 mars, 215 bataillons ont adhéré à la Fédération républicaine de la Garde nationale et constitué son Comité central composé de deux délégués par arrondissement élus par le conseil de légion et d’un chef de bataillon par légion délégué par ses collègues.

28 février 1871 - La Garde nationale garde les canons des Parisiens place des Vosges (source : Le Monde Illustré du 11 mars 1871)
28 février 1871 - La Garde nationale garde les canons des Parisiens place des Vosges (source : Le Monde Illustré du 11 mars 1871)

 Le 18 mars 1871 et l’élection de la Commune

Le 18 mars 1871, l’armée, envoyée par Adolphe Thiers, tente de s’emparer des canons de la Garde nationale entreposés à Montmartre et Belleville. La population s’y oppose et fraternise avec les soldats. Thiers s’enfuit à Versailles. Le soir, le Comité central de la Garde nationale s’installe à l’Hôtel de Ville. Le lendemain, il convoque les électeurs parisiens pour élire une assemblée communale. Les élections ont lieu le 26 mars. La Commune est proclamée le 28 sur la place de l’Hôtel de Ville en présence d’une foule enthousiaste. Le Comité central remet ses pouvoirs entre les mains de la Commune. Entre sa prise de pouvoir, le 18 mars, et la proclamation de la Commune le 28, le Comité central de la Garde nationale avait pris des mesures d’urgence : nomination de plusieurs de ses membres à la tête des principaux services publics, levée de l’état de siège, liberté de la presse, libération des prisonniers politiques, suspension de la vente des objets déposés au Mont-de-Piété, rétablissement de la solde des gardes nationaux, moratoire sur les loyers et échéances.

Les combats contre Versailles

Le 2 avril 1871, les versaillais engageaient les hostilités contre la Commune à Courbevoie, où se trouve aujourd’hui le quartier d’affaires de la Défense, faisant des premières victimes dans les rangs de la Garde nationale et parmi la population civile. À l’issue de cette première journée de combats, des fédérés faits prisonniers sont exécutés. En riposte les généraux Bergeret, Eudes et Duval, qui commandaient la Garde nationale, décidaient, sans en référer à la Commune, une sortie le 3 avril en direction de Versailles par Rueil-Malmaison, Meudon et Chatillon. Insuffisamment préparée, cette tentative échouait. Faits prisonniers, les membres de la Commune Duval et Flourens étaient exécutés sommairement.

La Garde nationale de la place Vendôme. Photographe anonyme (source : © Musée Carnavalet – Histoire de Paris)
La Garde nationale de la place Vendôme. Photographe anonyme (source : © Musée Carnavalet – Histoire de Paris)

 

Après, une trêve de huit jours, les versaillais commençaient le siège de Paris. Commandés par Mac-Mahon, ils avaient reçu des renforts venus des garnisons de province et des prisonniers des Prussiens libérés par Bismarck. A Neuilly et Asnières, les gardes nationaux repoussaient les assauts des troupes versaillaises. Au centre du dispositif, les fédérés sous le feu des canons versaillais, résistaient avec détermination. Mais, devenus très inférieurs en nombre, ils étaient contraints d’abandonner les forts d’Issy le 8 mai et de Vanves le 13. Les versaillais étaient maintenant au pied des remparts situés à l’emplacement de l’actuel boulevard périphérique.

Le 21 mai, les versaillais entraient dans Paris par la porte de Saint-Cloud. La semaine sanglante commençait et allait durer jusqu’au 28 mai, huit jours pendant lesquels la Garde nationale allait se battre derrière les barricades avec courage et héroïsme, et payer un lourd tribut à la répression versaillaise.

La bourgeoisie était victorieuse mais elle avait eu très peur du peuple parisien en armes. C’est pourquoi l’assemblée de Versailles prononçait la suppression définitive de la Garde nationale le 25 août 1871.

YVES LENOIR

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