Depuis septembre 2019, les internautes ont accès à un site qui contient une étude intitulée La répression judiciaire de la Commune : des pontons à l’amnistie (1871-1820). Il s’agit du site communards-1871.fr, dont l’auteur est Jean-Claude Farcy, ancien chercheur au C.N.R.S, spécialiste de l’histoire rurale et de la justice aux XIXe et XXe siècle.
La base de données concerne la Commune de Paris et non celles de province. Son intérêt est double : permettre d’affiner les informations sur l’histoire générale de la répression de la Commune et encourager les recherches à caractère plus thématique ou local, en élargissant le champ des investigations que favorisait déjà le Maitron.
L’auteur est allé fouiller dans les dossiers d’écrou des lieux de détention des insurgés, notamment ceux de la côte atlantique – Brest, Lorient, Cherbourg et Rochefort – ainsi que dans les dossiers des conseils de guerre, et a pu accumuler des informations sur 41 375 personnes jugées par la justice militaire.
Elles sont présentées sous forme de fiches nominatives par prévenu (origine, profession, âge, activité pendant la Commune, date d’arrestation, etc.) et de fiches thématiques variées.
Un texte général rappelle les conditions dans lesquelles se sont déroulées les arrestations, l’instruction des dossiers, les lieux de détention des prévenus, pontons ou prisons, ainsi que les mécanismes de mise en place de ces tribunaux militaires, leur mode de fonctionnement et informe sur les condamnations et l’exécution des peines.
Les recherches, dans la base de données, peuvent s’organiser de plusieurs manières. Soit par prévenu (liste alphabétique), soit par département d’origine des prévenus (dans cartographies), soit par les listes de détenus par lieux de détention.
Outre l’origine des prévenus, la cartographie fournit des statistiques par arrondissement et quartiers de domicile (âge, profession, ceux qui ont été condamnés, les bénéficiaires d’un non-lieu, les condamnés à la déportation, les décédés en détention, etc.).
La détention des prisonniers sur les côtes de l’Ouest est détaillée par ports, pontons, autres lieux de détention, avec des listes de non jugés et de non-lieux et on trouve mention des décisions judiciaires (conseils de guerre, tribunal correctionnel de la Seine) avec la date, le verdict et la législation appliquées (articles du Code pénal, Code de justice militaire, etc.), ainsi que des lieux de détention (pontons, prisons, bagne avec navire à l’aller et au retour) et les grâces demandées ou obtenues.
Des dossiers renseignent sur les insurgés en poste dans les forts, les engagés dans divers corps d’éclaireurs, francs-tireurs, tirailleurs, sapeurs-pompiers, ceux arrêtés
par les armées ennemies et livrés aux versaillais, ceux jugés pour des affaires particulières (destruction de la colonne Vendôme, exécution des otages, etc.).
Certains dossiers ont un accès réservé aux chercheurs, notamment ceux qui ont trait à la déportation en Nouvelle-Calédonie et aux condamnations à mort. Pour y accéder, une inscription est obligatoire auprès de l’Université de Bourgogne.
Comme l’auteur le souligne dans son introduction, l’histoire de la répression judiciaire « reste à faire » : la base de données est un bon point de départ pour les recherches.
Pour les passionnés de l’histoire des révolutions et mouvements populaires au XIXe siècle, le nom de Jean-Claude Farcy n’est pas inconnu. Il avait déjà mis en ligne, en 2012, la liste des inculpés de l’insurrection de juin 1848 et, en 2013, une recherche de même nature sur les poursuivis à la suite du coup d’État de décembre 1851 (sur les sites inculpés-juin-1848.fr et poursuivis-décembre1851.fr). Un récidiviste Jean-Claude Farcy ? Oui, mais d’utilité publique !
Et comme une bonne nouvelle ne vient jamais seule, Jean-Claude Farcy travaille à l’écriture d’un ouvrage sur la répression militaire et judiciaire de la Commune, dont nous aurons l’occasion de reparler dans ces colonnes lorsqu’il paraîtra.
GUY BLONDEAU