Les Amis berrichons de la Commune de Paris-1871 ont rencontré un jeune ferronnier d’art qui a créé "l’origine", inspirée du tableau de Courbet "l’Origine du monde".
Question : Julien de Vial, forgeron ? Ferronnier ?
Réponse : Je suis ferronnier d’art. Forgeron touche un ensemble de métiers sur le travail du fer par le feu. J’ai une formation d’apprenti ce qui permet vraiment de se confronter au métier et d’apprendre sur le tas, en pratiquant.
Il est de tradition de dire que ceux qui travaillent le fer appartiennent au milieu progressiste : oui ? Non ?
Le métier du fer a permis le développement des métiers industriels. Sans le fer, il n’y aurait pas eu les usines, les voies de chemin de fer... Le Siècle des Lumières est basé sur les métiers du fer, industriels ou artisanaux : l’industriel découle des techniques artisanales. Ferronnier est un métier ancestral. Il mélange énormément d’éléments : le fer qui provient de la terre, le feu, l’air qui sort du soufflet de forge, l’eau pour les trempes. C’est un mélange de tous les éléments, plus la main de l’homme qui permet d’aboutir à quelque chose de fini, de partir du très brut pour arriver au fini.
Le fer fait penser à l’Enfer, au Diable ?
Un petit peu : la poussière, le feu, le bruit, cela peut s’en rapprocher. On ne peut pas être ferronnier sans aimer le feu.
Votre raison sociale s’appelle l’Atelier d’Enfer…
L’enfer, c’est la chaleur, le feu, la vie, quoi ! C’est d’enfer = c’est super beau ! Et d’en faire = d’en fabriquer. C’est un mot qui m’est venu dès l’instant où je suis devenu apprenti. Je voulais devenir artisan. Dès le début de ma formation, j’avais le nom de mon entreprise, cela regroupe mon état d’esprit, ma façon de faire, cela me correspond bien.
Quelques Amis berrichons de La Commune de Paris ont remarqué une de vos œuvres : « l’origine ». Est-ce l’équivalent en fer de « l’Origine du monde » de Courbet ?
Complètement. C’est une interprétation libre. Je ne me suis pas permis de l’appeler "l’origine du monde", mais simplement "l’origine". C’est un travail sur une tôle, une tôle fendue et bombée.
Courbet ?
C’est une de ses œuvres qui m’a marqué, dans ma jeunesse, et qui me trottait dans la tête depuis un bon moment. Un jour, je me suis levé et j’ai eu envie d’exprimer ce concept de naissance. Je travaille beaucoup sur la déformation de la matière, pour créer l’ouverture. Il y a le galbe du ventre féminin...
Rappelez comment vous avez découvert cette "Origine du monde", alors que c’est une chose que l’on veut cacher ?
Quand on est petit, on aime bien voir ce qui est caché. Quand j’ai découvert cette oeuvre, je n’avais pas le même regard que maintenant, je la voyais plus terre à terre, excitante. Tout jeune adolescent, c’est quelque chose de mystérieux, c’est attirant, très représentatif : est-ce que j’ai vraiment droit de regarder ? Eh oui ! Nous avons le droit de regarder.
Et la Commune ?
Elle a marqué l’Histoire, c’est sûr. Au collège, le prof d’histoire nous l’a bien expliquée. Il avait une bonne sensibilité, il avait dépassé les bornes du programme. Il a expliqué les tenants et les aboutissants, et les changements créés, dans les mentalités, les comportements et l’ouverture donnée par la suite.
Revenons à « l’origine »
C’est une pièce qui date de fin 2012.Elle s’est promenée d’exposition en exposition. Elle suscite beaucoup d’intérêt. Les gens ne font pas forcément le rapprochement avec l’oeuvre de Courbet, ils la voient comme avec mon premier regard, mais quand nous parlons, je rappelle la démarche artistique ; les gens y sont très sensibles.
Propos recueillis par Michel Pinglaut qui a acquis « l’origine » et... la montre aux Amis.