Entre élus et électeurs, des échanges et des liens à tisser en permanence
En ce début de 21e siècle, nombre de citoyennes et citoyens de France s’interrogent sur ce modèle quelque peu malade de l’exercice vertical, et donc paradoxal, d’une démocratie verrouillée par la Constitution de la 5e République. Pourquoi ne pas se retourner sur cette « promesse » d’une démocratie par le peuple et pour le peuple, incarnée par la Commune de 1871 ?
Si les historiennes et historiens ont noté les imperfections et les dérives de cette expérience révolutionnaire, ils ont aussi souligné les aspirations réelles des élus à un lien direct avec leurs électeurs, une volonté de soumettre les décisions des représentants du peuple à son contrôle, pour être une République démocratique et sociale digne de ce nom.
Les élus du 26 mars 1871 sont désignés comme « commis » ou « mandataires ». Dans un manifeste publié le 22 mars 1871, quatre jours avant les élections, le Comité central de la Garde nationale annonce : « Les membres de l’assemblée municipale, sans cesse contrôlés, surveillés, discutés par l’opinion sont révocables, comptables et responsables. » Ils tentent de mettre en pratique le « mandat impératif » et la souveraineté populaire énoncée par Jean-Jacques Rousseau.
Avec la « Déclaration au peuple français », rédigée le 19 avril 1871 et publiée au Journal Officiel le 20, l’Assemblée communale réitère ce projet d’exercice démocratique en inscrivant « l’intervention permanente des citoyens dans les affaires communales par la libre manifestation de leurs idées ».
Dans les révoltes populaires récentes, telles celle des Gilets jaunes ou celle des jeunes contre la fuite en avant des élus face au désastre climatique, les appels à une 6e République, on peut voir un retour aux rêves de la Commune. Mais on doit faire attention à ne pas répéter certains travers et oublis, tels ceux qui accompagnèrent en 1871 cette révolution unique, à ne pas laisser au bord du chemin des pans entiers de la population : les femmes à l’époque, — présentes dans les clubs, dans l’action sociale et sur les barricades, mais absentes de l’assemblée élue, composée d’ un conclave d’hommes exclusivement — et les « étrangers » aujourd’hui, ceux qui vivent en France depuis des années et auxquels on refuse toujours le droit de vote ou celui de travailler...
SYLVIE BRAIBANT