Peut-être sommes-nous dans un moment où, plus que jamais, il est nécessaire de revenir à ce que fut la Commune de 1871. Non pas par pure nostalgie qui ferait de nous de sympathiques rêveurs et rêveuses mais en rappelant les mesures très concrètes que cette assemblée unique vota en seulement 72 jours et qui restent inspirantes.

À l’heure où d’exceptions en prétendues nécessités économiques, le temps hebdomadaire de travail est rallongé ici et là, il faut se rappeler qu’au printemps 1871 cette durée fut considérablement réduite pour toutes et tous, et que la Commune décida par décret de confier la gestion des ateliers abandonnés à leurs ouvriers.

À l’heure où les droits des femmes sont grignotés, il faut rappeler que même si elle « oublia » leur droit de vote, la Commune fut pionnière pour les Parisiennes aussi, grâce à cette « Union des femmes pour la défense de Paris » qui proposa l’égalité dans le travail, l’organisation en autogestion pour les ouvrières, et refonda le privé avec la reconnaissance de l’union libre.

À l’heure où sont annoncées des mesures supplémentaires pour traquer les migrants, il faut rappeler qu’au cœur du XIIIe arrondissement fut élu Léo Frankel, jeune juif de Hongrie et qu’il travailla avec la russe Élisabeth Dmitrieff pour élaborer des mesures sociales audacieuses, au nom de l’universalité humaine.

À l’heure où la presse indépendante se réduit sous nos yeux, jour après jour, sous les coups de l’économique et du politique, il faut se souvenir, comme nous l’avons fait tout au long de l’année 2024, de ces dizaines de titres éclos pendant la Commune et réaffirmer qu’on ne transige pas avec la liberté de la presse.

Et surtout, à l’heure où la démocratie est éborgnée, confisquée, il est urgent de rappeler la définition qu’en proposa la Commune : un mandat impératif et révocable, sous contrôle du peuple puisque la démocratie combine démos, le peuple, et kratos, le pouvoir.

Cette démocratie, il ne faut pas non plus oublier de se l’appliquer à soi-même, dans le public comme dans le privé, dans les urnes, la rue, les organisations politiques, les syndicats, les associations, jusque dans la nôtre, l’Association des Amies et Amis de la Commune de Paris 1871. Et garder en tête cette question posée par la journaliste-écrivaine André Léo : Si nous agissons comme nos adversaires, comment le monde choisira-t-il entre eux et nous ?

SYLVIE BRAIBANT CO-PRÉSIDENTE DES AACP

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