Le promeneur qui passait il y a peu devant le 85 de la rue Haxo, dans les Hauts de Belleville, pouvait lire au-dessus de l'entrée ces quelques mots énigmatiques : Villa des otages, et quelques pas plus loin, sons le porche d'une église, cette plaque étrange : Notre-Dame des Otages. II poursuivait alors son chemin sans en savoir plus. Depuis le 8 novembre 1996, une rame Decaux, posée presque clandestinement, donne quelques éléments d'explication.

C'est là que les communards ont exécuté 50 de leurs otages le 26 mai 1871, L'événement n'en est pas pour autant banalisé. La rame en question ne peut en effet rendre compte de la problématique de ce massacre, Ses lecteurs étant pour la plupart peu au fait de l'histoire de la guerre civile de 1871. Il nous faut donc aller plus loin pour comprendre pourquoi cette Villa des otages n'a pu devenir un véritable lieu de mémoire.

 

La villa des Otages vers 1900 (carte postale ancienne)
L'entrée de la villa des Otages 85 rue Haxo, vers 1900 (carte postale ancienne)

Quelles vérités pour un massacre ?

Le 22 mai 1996, lors d’un colloque tenu à la Mairie du XXe pour le 125e anniversaire de la Commune de Paris, j'ai eu l'occasion d'évoquer « Les otages de la rue Haxo ».

Cette communication visait d'une part à faire la lumière sur les circonstances du drame du 26 mai – des otages de la Commune, une cinquantaine, extraits de la Roquette par un peloton commandé par le Président de la Cour martiale Émile Gois avaient été fusillés « sauvagement » par la foule dans l’enceinte du 2e secteur, à la Cité Vincennes, rue Haxo, dernier Q.G. de I ‘insurrection. Elle visait d'autre part à poser le problème politique induit par ce massacre. Pourquoi ce terrible épisode n'avait-il pas été revendiqué par nombre d'auteurs communards tels Lissagaray, Vallès ou Vuillaume, ceux-là estimant, tout comme leurs ennemis versaillais, qu’il était dû à un débordement furieux d'irresponsables et de mégères ? J'ai pu ainsi essayer de montrer, en utilisant davantage les sources, qu'il était annoncé depuis longtemps dans les réunions publiques et les clubs rouges et surtout qu'il avait bien été le fait d'authentiques communards. Encore faut-il préciser ici que des élus de l'Hôtel de ville et des chefs de la Garde nationale qui, par ailleurs, n'avaient pas été les derniers à jeter de l’huile sur le feu - notamment par le vote du Décret sur les otages - tentèrent in extremis de s'opposer à cette exécution populaire que, par la suite, des historiens interprétèrent comme étant « des représailles ».

L'arrivée des otages sur le lieu du massacre, carte postale.

L'arrivée des otages sur le lieu du massacre, carte postale.

La « boucherie » de la rue Haxo qui n'a, précisons-le, aucune mesure avec la répression versaillaise qui a fait des milliers de victimes, n'a pas jeté le trouble que d'un seul côté. Chez les versaillais, la passion contre-révolutionnaire a provoqué un « front répressif »  contre les « cannibales » de Belleville et les élus de la Commune du 26 mars, ces derniers étant accusés d'avoir donné des ordres pour envoyer les otages à la mort. À ce propos, cette recherche m'a permis de prouver qu'il n'en fut quasiment rien.

Enfin signalons que, pour sortir des imprécisions administratives et du folklore journalistique, je me suis livré à une vaste enquête d'identification des morts de la rue Haxo. Grâce à la visite des cryptes et à l'étude des registres des cimetières et de l'état civil, j'ai pu dresser une liste exacte de ceux que l'on appelle encore aujourd'hui dans des publications éducatives des victimes de la « justice du peuple ». On y trouve 10 religieux, 36 gardes de Paris et gendarmes, 1 officier de paix et 3 indicateurs de police.

Dois-je ajouter que cette étude, qui devait aller au-delà des mythes, d'où qu'ils viennent, n'avait rien d'évident ? Les enjeux politiques ou religieux, particulièrement en ce qui concerne la documentation du siècle dernier, sont autant de pièges qui jalonnent la route du chercheur.

La confusion entretenue de part et d'autre autour de cette affaire s'explique, comme nous allons le voir, par une lutte entre la mémoire et l'oubli. Pour schématiser, disons que du côté « versaillais », à travers enquêtes, livres et commémorations, on va chercher à établir une vérité pour ensuite en conserver le souvenir, tandis que du côté « communard », on va s'efforcer d'oublier « ces dangereux évènements ». En modifiant les enjeux, l'évolution politique ultérieure du pays a aussi eu pour principale conséquence un certain oubli parfois amnésique de cet épisode tragique de la guerre civile : la rue Haxo est devenue, presque pour tout le monde, un lieu de mémoire problématique.

 Assassinat de 62 otages rue Haxo 85 à Belleville. Le 26 mai 1871 à 5 heures du Soir - Photomontage réalisé par Eugène Appert et issu de la série des Crimes de la Commune. (Wikimédia)
Assassinat de 62 otages rue Haxo 85 à Belleville. Le 26 mai 1871 à 5 heures du Soir - Photomontage réalisé par Eugène Appert et issu de la série des Crimes de la Commune. (Wikimédia)

 

Liste des otages tués rue Haxo

 

Religieux :

Compagnie de Jésus: Olivaint Pierre, 55 ans, prêtre, Supérieur de la rue de Sèvres. Caubert Jean, 60 ans, prêtre. De Bengy Anatole, 46 ans, prêtre.

Congrégation des Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie (Picpus) : Rouchouze Marcellin, 60 ans, prêtre. Tuffier Polycarpe, 64 ans, prêtre, Supérieur de Picpus. Radigue Stanislas, 48 ans, prêtre. Tardieu Frezol, 56 ans, prêtre.

Compagnie de Saint-Sulpice : Seigneuret Paul, 26 ans, séminariste.

Congrégation des frères de Saint Vincent de Paul : Planchat Henri, 48 ans, aumônier de l'œuvre des patronages.

Immaculée conception :

Sabatier, vicaire à Notre Dame de Lorette.

Gardes de Paris et gendarmes :

Garodet Jacques, 47 ans, MDL, Garde de Paris. Geanty Jean-Baptiste, 43 ans, MDL, Garde de

Paris. Bermond Louis, 42 ans, brigadier, Garde de Paris. Cousin Pierre, 44 ans, brigadier, Garde de Paris. Millote Louis, brigadier, Garde de Paris. Poirot Jean, 44 ans, brigadier, Garde de Paris. Pons Jean, 44ans, brigadier, Garde de Paris. Bellamy, gendarme à cheval. Biancherdini Jean, garde de Paris. Blanchon, gendarme à pieds. Bodin Jean Philippe, 38 ans, garde de Paris. Breton Nicolas, 42 ans, garde de Paris. Carloni Xavier, 44 ans, garde de Paris. Chapuis Georges, garde de Paris. Colombani Fabien, garde de Paris. Coudeville Charles, garde de Paris. Doubler Léon, 42 ans, garde de Paris. Ducros Jean-Louis, garde de Paris. Dupré Augustin, garde de Paris. Fischer Joseph, garde de Paris. Fourès Jean, garde de Paris. Keller Philippe, 43 ans, garde de Paris. Lacaze, gendarme à cheval. Mannoni Jean, garde de Paris. Marchetti Charles, garde de Paris. Margueritte Jean, garde de Paris. Marty Jean, garde de Paris. Mongenot François, garde de Paris. Mouillie Joseph, garde de Paris. Paul Laurent, garde de Paris. Pauly Jacques, 43 ans, garde de Paris. Pourteau Jacques, 43 ans, garde de Paris. Riolland Claude, garde de Paris. Valder Louis, 43 ans, garde de Paris. Valet, gendarme à pieds. Villemin Sébastien, garde de Paris. Weiss Sébastien, 30 ans, garde de Paris.

Civils :

Derest Claude, 47 ans, officier de paix de l'ex Brigade Lagrange, la police politique de l'Empire. Greffe, ébéniste, membre de la Libre Pensée, ex agent secret de Lagrange. Largillière Joseph, 60 ans, ébéniste, ancien insurgé de juin 48, blanquiste et ex agent secret de Lagrange. Ruault Joseph, 58 ans, tailleur de pierres, ancien des sociétés secrètes et ex agent secret de Lagrange.

Remarque :

on notera qu'il y a ci-dessus 37 gardes de Paris et gendarmes bien que le véritable chiffre soit celui de 36. En fait il y en a 40 d'inscrits sur le monument du cimetière de Belleville. On peut retrancher les 3 hommes fusillés à Sainte Pélagie. Reste 37, soit 1 de trop. 35 figuraient sur la plaque aux 52 noms : pour le 36e nous avons donc le choix entre Blanchon, gendarme à pieds, et Lacaze, gendarme à cheval.

 

 

La tentative expiatoire

Dès la découverte de la « fosse sanglante » le 29 mai 1871, on peut se rendre compte qu'il sera difficile, y compris pour tout ceux qui, à cette époque, se réclament de l'ordre social, de faire de la Villa Vincennes un lieu de mémoire. Certes les récits d'un certain nombre de témoins et les dénonciations d'un jeune communard permettent d'établir une partie des faits mais presque aussitôt le « front versaillais » se défait. Les diverses congrégations religieuses récupèrent les dépouilles des leurs. Aujourd'hui, leurs tombes sont dispersées dans divers quartiers de Paris, en banlieue ou en province. Les gardes de Paris et les gendarmes, emmenés au cimetière de Belleville, y auront leur monument en 1877. Les corps du policier Derest et du mouchard Largillière les suivent. Le premier a rejoint le Pré Saint-Gervais, le second, qualifié tout d'abord de « gendarme » a disparu. Je n'ai rien trouvé jusqu'ici sur les deux autres « agents secrets », Ruault et Greffe, en ce qui concerne leurs lieux de repos.

Il n'y aura donc aucune sépulture dans le « jardin des otages ». Les pèlerins et les visiteurs ne pourront trouver matière à leur recueillement ou à leur curiosité que dans une reconstitution imaginaire.

Plaque commémorative du 28 mai 1871, Villa des Otages, 85 rue Haxo, 20ème arrondissement, Paris. Commune de Paris. - Photographie :  Union Photographique Française, photographe (1910)  (source : © Musée Carnavalet – Histoire de Paris)
Plaque commémorative du 28 mai 1871, Villa des Otages, 85 rue Haxo, 20ème arrondissement, Paris. Commune de Paris. - Photographie : Union Photographique Française, photographe (1910) (source : © Musée Carnavalet – Histoire de Paris)

Le nombre exact des victimes et leur identité sont, dès le début, sujet à caution. Le commissaire Gitzner a recensé « 47 martyrs » mais la première plaque commémorative comportera 52 noms. Le monument du centenaire et l'accueil de la Paroisse indiquent le chiffre de 49 victimes. Les listes de noms, ici et là, sont souvent fantaisistes. Le gros rapport du 6e Conseil de guerre, de 1872, reconnaîtra que l'instruction s'est rapidement heurtée au mur du silence. Cet acte d'accusation n'est pas lui-même scrupuleux : c'est un récit qui cherche ses effets pour mieux perdre tout ceux qui ont pu se compromettre dans l'affaire. Une pure représentation donnant de tous les communards une image absolument négative. On y retrouve le mystérieux chiffre de 47 victimes. Au-delà du mythe « à destination », on devine que ce manque d'unité autour des victimes a empêché un travail sérieux de mémoire, condition sine qua non pour ériger un monument de dimension nationale. Les projets n'ont pas manqué pourtant car le « jardin sinistre », qui se situait dans ce périmètre « ostracisé » était très visité aux lendemains de la Commune. Dès 1872, L’Œuvre expiatoire, approuvée par le nouvel Archevêque de Paris, J. Hippolyte, accueille sur les lieux des centaines de pèlerins, y organisant des « visites publiques » - un premier "musée" étant établi au 85 rue Haxo – et tente par souscription de réaliser un double projet :

« 1 - L’édification d’un monument en mémoire des otages qui ont péri les 24 et 26 mai 1871.

2 – La fondation sur le même lieu d’établissement de bienfaisance. »      

Cette œuvre, où l’on remarque toute une série de notables « parisiens », dont Louis Lazare, Directeur des publications municipales, veut donc créer

« un sanctuaire pour honorer la mémoire de ces nobles et généreuses victimes et pour servir à l'instruction de la postérité », 

donc établir un lieu de mémoire à vocation pédagogique par un monument architectural spectaculaire, mais aussi tout un ensemble « d’établissements de bienfaisance » pour opérer la « transformation si humainement utile de cette partie du 20e arrondissement » ; l’enjeu étant bien entendu de développer une bienveillante philanthropie « pour les classes nécessiteuses ». « L’appel à tous les chrétiens de l'univers catholique » et « aux amis de la France » de l’Œuvre expiratoire témoigne d’une certaine ambition. Il ne semble pas que les dons recueillis aient permis de donner une suite concrète à ce projet malgré (ou à cause de) la campagne de presse de 1872 autour du procès des « séides de la Commune » compromis dans le « massacre de la rue Haxo » et les importantes célébrations religieuses qui , « deuil public » à l'appui, en ont alors ravivé le souvenir. À ce moment-là déjà les Autorités craignent d'exacerber des tensions persistantes et des consignes sont données en ce sens aux Gardes républicains :

« il importait – écrit un général à propos d’une manifestation commémorative – de ne pas y envoyer un détachement nombreux qui prendrait aux yeux des habitants le caractère d’une manifestation ».

Cette Œuvre expiatoire va être relayée en 1873 par la Société des otages survivants de la Commune fondée par un fabricant de chaussures, Eugène Crépin. Celui-ci, qui avait été emprisonné par la Commune pour ses relations avec la police de Versailles, veut mettre sur pieds une « internationale des honnêtes gens » mais aussi installer sur le site logements et ateliers. Outre ces réalisations « sociales », cette société prévoit notamment un « monument expiatoire » et l'ouverture d'une salle du souvenir, sorte de musée des objets déjà recueillis.

Ce projet ambitieux où le souvenir du carnage, conçu comme pédagogie, doit tenir une place de premier plan, va tourner court. En effet ni le clergé ni les Autorités ne vont le soutenir. Les statuts de cette Société ont un ton « versaillais » qui rappelle par trop la guerre civile. Lorsqu'en août 1873, plusieurs milliers de personnes se rassemblent sur le terrain pour inaugurer le « monument commémoratif » (en fait la plaque avec les 52 noms), l'entreprise de Crépin est déjà condamnée par les instances gouvernementales et le clergé est absent. Le Ministère de l'Intérieur joue la carte de l'apaisement et va s'opposer « à la constitution d'une société ayant pour but (...) de perpétuer le souvenir le plus sanglant de ces épisodes (de 1871, ndlr) ». Le Maréchal de Mac Mahon lui-même, sollicité, refuse son patronage à Crépin car il faut

« dominer l'un des plus douloureux souvenirs de la guerre civile ».

Il ne va donc rester de ces projets que le petit musée et la plaque de marbre aux lettres d'or. La « collection » des objets du « théâtre du crime », dont l'authenticité est douteuse, sera néanmoins longtemps visitée par les « touristes ». Après la mort de Crépin, en 1888, elle sera acquise par un notaire de Belleville demeurant selon les habitants - décidément toujours aussi anti-bourgeois- au « château des vaches ».

 

Condamnations prononcées par le 6e conseil de guerre en 1872 dans l’affaire de la rue Haxo

 

Condamnations à mort :

François Jean-Baptiste, 34 ans, layetier-emballeur, Directeur de la Roquette, exécuté le 24 juillet 1872. Dalivous Louis, 26 ans, couvreur, capitaine de la 3e compagnie du 74e bataillon, exécuté le 20 juillet 1872. Benot Victor, 39 ans, garçon-boucher, Colonel de la légion Bergeret, exécuté le 22 janvier 1873. Saint-Omer (de) Émile, 44 ans, négociant, Lieutenant à la 3e compagnie du 74e bataillon, exécuté le 24 juillet 1872. Aubry Charles, 21 ans, paveur-bitumier, garde de la 1ère compagnie du 74e bataillon, exécuté le 25 juillet 1872. Trouvé Honoré, 21 ans, Chasseur insurgé du l8 mars, devenu Chasseur fédéré, peine commuée en Travaux forcés. Racine Jean-Baptiste, 22 ans, peintre sur verre, garde au 80e bataillon, ex soldat du 136e insurgé du 18 mars, peine commuée en Travaux forcés le 22 août 1872.

Gois Pierre François, l2 ans, employé, Colonel président de la Cour martiale, condamné à mort par contumace le 30 septembre1872.

Travaux forcés à perpétuité :

Amary Édouard, 20 ans, galochier, sergent major au 74e bataillon. Broussa Pierre, 25 ans, journalier, Chasseur fédéré. Desmoulins Gautier, 36 ans, garçon de magasin, officier d'état-major au 2e secteur. Gaude Victor, l9 ans, Fleuriste, Chasseur fédéré. Hamon Jean-Marc, 53 ans, peintre en bâtiment, capitaine adjudant-major du 173e bataillon. Raymond Michel, 20 ans, journalier, garde à la 3e compagnie du 74e bataillon. Rigaud Joseph 37 ans, chaudronnier garde à la 3e compagnie du 74e bataillon.

Travaux forcés à temps :

Bruchon Claude, 53 ans, cordonnier, caporal au 174e bataillon, condamné à 20 ans. Ramain Antoine, 46 ans, gardien de prison, nommé Brigadier-chef à la Roquette sous la Commune, condamné à 15 ans.

Déportation dans une enceinte fortiée :

Barthelemy Jacques, 20 ans, maçon, garde à la 3e compagnie du 74e bataillon. Colnet Albert, 26 ans, estampeur en bijou, garde à la 3e compagnie du 74e bataillon. Piat Louis, 47 ans, clerc d'huissier, délégué de la 10e compagnie du 94e bataillon, membre du Comité Central de la Garde Nationale.

Déportation simple :

Dauvillé Ernest, 20 ans, plombier, garde à la 3e compagnie du 74e bataillon. Hemon Gustave, 26 ans, tourneur sur bois, garde à la 3e compagnie du 74e bataillon. Mongars Louis, 39 ans, polisseur sur acier, garde à la 3e compagnie du 74e bataillon.

Réclusion :

Croizat Jean-Jacques, 62 ans, fabricant de galoche, capitaine de la 9e compagnie au 231e bataillon, condamné à 20 ans.

 

Les jésuites dans leurs œuvres

Trois des religieux tués rue Haxo étaient membres de la Compagnie de Jésus, soit les pères Pierre Olivaint (le Supérieur), Jean Caubert, Anatole Bengy. Leurs tombes sont rue de Sèvres, à Saint-Ignace, avec celles des deux autres jésuites fusillés par les communards. Cependant l'on doit noter que dès 1872 la Congrégation a voulu acheter le terrain, dont le propriétaire était alors un certain Lévèque, rentier du boulevard Sébastopol. L'Œuvre expiatoire, aux attaches gallicanes, qui convoitait la Villa Vincennes, acceptait de s'effacer, mais la Société des otages, à sa suite, tentait de s'emparer des lieux. Ce projet ne put aboutir.

Ce n'est pourtant qu'en 1886 que les jésuites allaient définitivement se rendre acquéreurs de cet « emplacement où sont tombés les victimes » dont personne ne voulait plus, pour une somme assez faible. Dans un premier temps, il était surtout question de protéger contre toute profanation le site sacré de l'exécution.

Le temps passant, l’occupation des lieux allait se concrétiser. À partir de 1889, année au cours de laquelle un nouvel achat permit d'agrandir la propriété, des messes furent célébrés dans un petit oratoire, lequel fut remplacé par la « chapelle rouge » 250 places, construite en 1894 : le catéchisme était organisé dans deux hangars attenants par des Dames congréganistes. On y célébra1 98 baptêmes d’enfants et 9 d'adultes en 1896. On parle cependant encore de « sanctuaire » et le souvenir des otages reste très fort. Le pèlerinage de 1897 devant le « sinistre mue » et la messe commémorative rassemblent de nombreux fidèles issus de toutes les couches de la société. Le père Foulongue a fait déposer plaques explicatives et croix « où furent déposés les corps des victimes ».

Néanmoins ce mouvement commémoratif n'est pas prioritaire. L'évangélisation de la population « païenne » est bien le but principal. Ainsi, en 1898, une chapelle plus importante voit le jour. On se félicite l'année suivante de la procession du Saint-Sacrement qui s'est déroulée dans le jardin. Il faudra attendre 1909 pour que la presse rouvre les plaies, le terrain de la rue Haxo étant, suite aux lois de 1901 et 1902 et à la dispersion des jésuites, mis en vente comme « biens délaissés ». Toute une campagne rappelle « le souvenir d'une scène de sang et d'horreur ». Les journalistes insistant sur l’aspect épouvantable et désolé du lieu :

« c'est un mur (...) devant lequel il s'est passé quelque chose de terrible et de mystérieux ».

Pour certains cette vente – Un certain Maître Cortot, avoué, a acquis la propriété pour 140 000 F – représente la fin d'une époque douloureuse : dans ce

« triste jardin (…) nul ne viendra plus désormais rêver aux leçons inutiles de l'histoire »

regrette le Petit Temps.

En fait, très vite, les jésuites vont rebondir par un retour dont ils ont le secret (une bienfaitrice a racheté l'ensemble de la propriété). Des Pères, revenus rue Haxo, relancent leur apostolat sur une plus grande échelle. Bien sûr il y a toujours une place pour le souvenir. Lors de la démolition de la Roquette, les « cellules » des jésuites sont rachetées pour être reconstituées

« dans la cour du patronage », mais l'essor des œuvres concurrence le lieu de mémoire. Pour la réussite apostolique, il faut mettre une certaine sourdine au rappel de ces évènements sanglants : C’est endroit ne doit plus être maudit si l'on veut gagner à la cause chrétienne la jeunesse de ce « Belleville de la barrière ». En effet, sur cette « colline rouge » de Saint-Fargeau, dans les années 20, le danger révolutionnaire semble persister. Les descendants des Communards paraissent encore menacer l'ordre établi ; selon les prêtres, la population de ce point culminant de Paris est « toujours aussi violente » : un nouveau massacre de curés, de policiers et de bourgeois par les « gardes rouges » pourrait se produire. Il n'est donc pas question de déployer une véritable pédagogie du souvenir. En effet si l'on fait exception des commémorations annuelles, prouvant que la mémoire des clercs est bien gardée, on peut s'apercevoir, en étudiant la vie de l'Œuvre des Otages, que le projet de fond a bien changé.

Très tôt, les jésuites avaient songé

« transformer le théâtre de ces sanglantes horreurs en un centre de sainteté et d'apostolat ».

L'évangélisation des « indigènes » des Hauts de Belleville par les Dames patronnesses et les prêtres se poursuit donc avec d'ailleurs un succès certain. Quelques ex communards et leurs familles se convertissent. Des jeunes des Villas deviennent séminaristes. Les activités du patronage attirent assez spontanément les gamins turbulents et désœuvrés de ce quartier pauvre. Ils endossent le maillot blanc orné du chrisme pour se livrer à la gymnastique. Selon l’expression d’un chroniqueur, le patronage est le donjon de la forteresse installée dans ce pays de « conquête ».

Le père jésuite Henri Diffiné (1890-1978)
Le père jésuite Henri Diffiné (1890-1978)

Certes les chiffres fournis par le véritable fondateur de L'Œuvre des Otages, le Père Henri Diffiné (1890-1978), qui en a exercé le ministère de 1932 à 1951, sont impressionnants de 1893 à 1935, il y a eu      4 253 communions et 15 693 garçons et filles ont fréquenté les patronages. 32 vocations se sont déclarées : on comptera pour finir 80 œuvres - mais ils ne reflètent pas cette coupure entre ceux qui fréquentaient Les Otages et ceux qui choisissaient de les ignorer. La chose allait se compliquer par l'apparition militante de la JOC rue Haxo. Une concurrence forcément mal ressentie dans le quartier où les militants « unitaires » (CGT) étaient nombreux. On était ici en « territoire communiste ». Le Père Diffiné, ex-ouvrier, dont la famille avait compté des communards, ne manquait pas de combativité mais plutôt comme on allait le dire chez les siens, de « souplesse ». Chaque année, il organisait la commémoration du 26 mai, étant d'ailleurs l'un des plus ardents pour obtenir cette béatification des jésuites tombés sous la Commune demandée dès 1872. Il fut l'auteur d'une biographie de 106 pages sur « Pierre Olivaint l816-1871 un témoin du christ jusqu'au sang » qui n'eut jamais le Nihil Obstat de la Compagnie. Les photographies de ces anniversaires du « massacre des otages » nous montrent le jardin empli de la foule des fidèles, l'autel dressé au-dessus de la fosse où les corps avaient été jetés en 1871. La messe, dûment annoncée par le bulletin des otages, est célébrée chaque année par des personnalités religieuses. Jusque en 1951 le Père Diffiné fera dans le bulletin une sorte d'éditorial rappelant les événements pour en tirer des leçons religieuses ou patriotiques. Pour ce mystique en effet cette « terre » est un lieu rédempteur :

« sanguis martyrum, semen crhristianorum (le sang des martyrs est une semence de chrétien) ».

Ce texte annuel lui permet de relier le sacrifice des cinq jésuites de l87l à l'apostolat populaire de L'Œuvre des otages. Il bataille longtemps pour l'édification d'un monument commémoratif : en mai 1943, une maquette est même exposée dans la chapelle. Il faut d'ailleurs noter que dans cette église, que nous connaissons sous le nom de Notre-Dame des Otages et qui a vu le jour de 1936 à 1938, grâce aux efforts du Père Diffiné, aucune inscription explicite ne concerne les otages de la Commune (cet édifice s'est appelé tout d'abord Chapelle du Sacré-Cœur).

Avec la guerre 39-45 les choses vont de toute façon se modifier. Les jésuites s'impliquent en effet non seulement dans les œuvres d'aide sociale aux malheureux en tous genres de cette époque noire mais aussi dans une certaine résistance, comme l'a rappelé le Père Planckaert. Évadés, réfractaires au STO, communistes et juifs persécutés vont trouver de l’aide rue Haxo. Henri Diffiné n'a-t-il pas condamné publiquement à la Basilique Montmartre en 1942 la rafle du Vel'd'Hiv ? Ses sentiments ne font aucun doute sur ce plan. Si, en 1945, il s'inquiète de la persistance du mal intérieur, ce qu'il appelle « la tuberculose morale », il se réjouit d'être débarrassé de la « vermine » allemande.

Les temps changent cependant : « la passion du 26 mai 1871 » ne peut plus s'exprimer comme auparavant. On ne dit d'ailleurs rien aux enfants de ces vestiges de l'époque de la Commune toujours présents, bâtiments, plaques ou « prisons » Diffiné, dans ce contexte de paix et malgré les nuances qu'il introduit dans ses textes, devient, aux yeux même de la Compagnie, trop « classique ». Ne veut-il pas que l'on considère envers et contre tout la tuerie de la rue Haxo comme une perpétuelle leçon de chose politique ?

« Quand vous descendrez de ce haut lieu de Paris - écrit-il en mai 1951 – vos yeux verront mieux la vraie route de la France ».

Le don par-dessus l’ambiguïté

Portrait sur médaille du Père Etienne Thouvenin de Villaret (1917- 1983) (source http://www.mjc-leshautsdebelleville.com/la-mjc-cest-vous/un-peu-dhistoire/)
Portrait sur médaille du Père Etienne Thouvenin de Villaret (1917- 1983) (source http://www.mjc-leshautsdebelleville.com/la-mjc-cest-vous/un-peu-dhistoire/)

C'est dans les années cinquante que le grand virage est pris par L'Œuvre de la rue Haxo, sous l'impulsion du Père Etienne Thouvenin de Villaret (1917- 1983).

Lorsque cet « homme de théâtre » arrive en 1951 pour prendre la direction des Otages, le quartier n'a guère changé : « Petites usines » et « nombreuses maisons plus ou moins lépreuses » parsèment ce qu'on appelle encore la « zone ».

L'apostolat de ce prêtre étonnant sera placé sous le signe de la joie. Il veut avant tout le bonheur de ses paroissiens. Ayant tout d'abord protesté contre les expulsions qui sévissent Porte des Lilas, l'artiste se fait maçon. C'est ainsi que naissent Haxo I (rue du Borrego), Haxo II (83, rue Haxo), le Foyer des jeunes travailleurs et la MJC des Hauts-de-Belleville qui se fera connaître par une série remarquable de manifestations culturelles.

L'Habitat communautaire et la MJC, construits sur la propriété des jésuites menacée de réquisition par la Ville de Paris, résultent en fait d'un « don » qui exprime sans aucun doute l’évolution d'une Église qui veut s'engager plus résolument contre la misère des travailleurs - les jésuites en particulier avec l'Action populaire de Vanves et la Province de Paris - mais le mérite de ces réalisations revient avant tout à Étienne Thouvenin qui, dès son arrivée, est « à l’écoute des besoins de la population » pour reprendre la formule de Marie Fourcade, aujourd'hui présidente de la MJC.

Cet homme ouvert « aux échanges » et « assoiffé de justice » va donc tourner une page :

« je ne suis pas attaché aux vieilles pierres pour elles-mêmes »

écrit-il en 1953. L'Habitat communautaire, 160 logements ouvriers, est occupé par ses bénéficiaires dès 1958 et la MJC, avec son Foyer de jeunes travailleurs (140 places), ouvre en 1960. Pour cela, il a fallu détruire une partie des vestiges de 1871 : le Pavillon de l'horloge et surtout le fameux Mur devant lequel les otages avaient été fusillés. Il n'en reste aujourd'hui que quelques moellons sous le petit monument du centenaire. Si un bout de l'enclos a été conservé, les plaques de marbre dénonçant les communards ont disparu ainsi que presque toutes les « cellules » de la Roquette. Une partie du terrain des otages à la hauteur du 79, au coin de la rue Haxo, a été vendu en 1953 à la ville de Paris afin qu'elle y établisse une école, l'annexe du collège Pailleron. Depuis 1980, le service d'architecture de la Ville de Paris pour le XXe s'y est installé. On ne célèbre plus de messes commémoratives sur les lieux.

Ce choix d'un certain oubli - car le Père Thouvenin savait ce qui s'était passé ici - va trouver sa consécration lors du centenaire de la Commune dûment célébrée à la MJC en mai 1971. Une exposition, un débat (avec comme invités Armand Lanoux, Georges Cogniot et Jacques Rougerie), une pièce de théâtre sont organisés avec le soutien très actif d'Étienne Thouvenin

qui, par ailleurs, n'interviendra pas à la MJC pour signaler cette ultime cérémonie qui va se dérouler le 26 mai à quelques mètres de là afin d'inaugurer religieusement le monument du centenaire des otages dans ce qu'il reste de « l'enclos de la mort ». Le texte que l’on peut toujours y voir inscrit dans la pierre introduit l'idée capitale selon laquelle les responsabilités de cette tuerie ont été partagées puisqu'il évoque

« la répression humaine qui mettait fin, en ces jours, aux excès de la Commune ».

Quelques années plus tard, les jésuites iront plus loin encore. C'est ainsi qu'en 1974, le Père Maurice Husson, chargé de la Paroisse, commentant le départ imminent des jésuites, conclut son texte par ces mots sur la rue Haxo :

« Haut lieu parisien qui garde encore le souvenir d’une espérance populaire : la Commune. Espérance que tous les religieux qui sont passés aux "Otages" n’ont pas travaillé à décevoir, mais à purifier, afin que les mots de Justice et de Fraternité passant par l’Evangile, prennent une dimension plus universelle et qu'ainsi la paix entre tous soit possible. »

En 1989 enfin la Société immobilière Haxo-Saint-Fargeau, mise en place dès l'origine par la Compagnie de Jésus, complétera le transfert de 1974 en donnant au diocèse « le terrain de la rue du Borrego » qu'elle s'était « réservé ».

Les jésuites sont partis en 1975 afin de poursuivre ailleurs leur mission ouvrière, la Paroisse Notre Dame des Otages étant revenu au Diocèse par un nouveau don.

Le Père Thouvenin de Villaret est décédé en 1983 : il attend toujours son biographe. Aujourd'hui le jardin des otages n'est plus guère fréquenté. Ce 26 mai 1998, lorsque j’y suis revenu, il était désert et bien tristounet. À l'Oratoire de l'église, une jeune stagiaire, intriguée par la petite plaque indiquant « monument des otages » m'a demandé ce que ça voulait dire, supposant, comme la plupart des habitants du quartier, qu'il s'agissait d’otages exécutés là durant la seconde guerre mondiale. Le lieu, muet et abandonné, semblait l'oppresser quelque peu.

Affiche de la MJC des Hauts de Bellevilles (construit sur les lieux de la maison des Otages rue Haxo et Borrégo dans les Hauts de Belleville - Paris 20ème)
Affiche de la MJC des Hauts de Bellevilles (construit sur les lieux de la maison des Otages rue Haxo et Borrégo dans les Hauts de Belleville - Paris 20ème)

Conclusion

La Villa des Otages n'a pu devenir un « lieu de mémoire » en partie à cause du contexte politique national et ce jusqu'à nos jours. Une Église ralliée à la République puis au « progressisme » ne pouvait plus assumer pleinement une bataille expiatoire. En outre, comme l'ont fort justement noté quelques commentateurs, y compris religieux, la présence parmi ces otages de « gendarmes » et de « civils » a sans doute empêché la béatification des prêtres martyrs : leur cause était différente (notons ici l'absence tout à fait significative des trois mouchards sur les plaques de marbre de Notre Dame de Paris).

Le fait que Les Otages soient devenus, durant presque un siècle, une Mission de la Compagnie de Jésus n'a pu qu'accroître les difficultés. Certes le sacerdoce du père Diffiné, cet homme d'action, relevait de la croisade eucharistique. Pour lui, l'Œuvre de la rue Haxo étant fondée sur « le sang des martyrs », cela impliquait un « devoir de mémoire » qu'il remplit d'ailleurs avec Ferveur dans un style parfois abrupt. Estimant que la Commune n'avait été qu'un épisode de la crise nationale et qu'il était, dans son bastion de la chrétienté de la rue Haxo, toujours assiégé par ce mauvais peuple haineux et violent, il n'en développa pas moins de nombreuses œuvres en direction de la classe ouvrière dont il était issu ; fidèle à ses convictions, il tenta presque jusqu'au bout de faire édifier un « véritable » monument commémoratif mais l'apostolat populaire l'emporta sur cette obsession. C'est lui qui s'engagea pour que l'on achète les terrains nécessaires à un nouveau développement et qui demanda la transformation de l'Etablissement en Paroisse.

L'arrivée d'Etienne Thouvenin de Villaret, fils de général, en inaugurant, malgré une certaine continuité, un tout autre style, ne pouvait jouer qu'en faveur de l'oubli. Après le modèle de la souffrance christique comme référence voici venir celui de la félicité par l'union et la fête.

Jésuite Etienne ? Bien sûr mais maintenant il faut savoir choisir l'essentiel.

Ici c'est le bonheur du peuple dans une approche vivante de la culture. Dans cette communion, dans ce don de soi, il semble bien que les références « gauchisantes » du moment, sublimées, aient pris le dessus et c'est l'extraordinaire refoulement du massacre des otages de 1871 : le peuple victime prend leur place. Le Mur sinistre et culpabilisant ne doit plus exister. Il est détruit pour des raisons constructives bien dans l'ai r du temps, à savoir la mise en place d'un habitat populaire digne de ce nom et d'une MJC qui prend son rang dans ce mouvement culturel issu de la Résistance mêmes si son apparition est tardive. Le tournant progressiste de la Compagnie de Jésus dès 1965 et les conséquences des évènements de1968 ont porté un coup définitif au « mythe tragique » de la rue Haxo. L'oubli volontaire des uns parfois nourri par le doute et l’amnésie plus ou moins organisée des autres ont renvoyé aux vieilles lunes cette colère d'un peuple en armes effrayant et incontrôlable qui, en dernière analyse, ne peut être reconnu par le gouvernement des hommes.

Alain Dalotel (article paru dans Gavroche N°103 de janvier-février 1999) 

Gavroche est une revue d'histoire populaire trimestrielle créée en 1981. La revue a cessé d'être publiée depuis le numéro 166 d'avril-juin 2011. La totalité de la revue Gavroche a été mise en ligne sur le site http://archivesautonomies.org/spip.php?rubrique263

 

Extrait d'une « lettre ouverte » du 12 mars 1971,

intitulée « 1871, 1961, 1971 », signée d'Étienne Thouvenin de Villaret dans le cadre de la préparation du 10e anniversaire de la MJC et du 100e anniversaire de la Commune de Paris:

(...)

Chers Compagnons de la Chanson, votre leçon est la même : une claire, une simple leçon de bonheur. Merci d'avoir accepté de chanter aujourd'hui pour le dixième anniversaire de la Maison des Jeunes « Les Hauts de Belleville », qui est aussi le centième anniversaire de la Commune de Paris. Les jeunes la célèbrent avec une exceptionnelle ferveur parce qu'un moment de son histoire s'est déroulée ici même.

Dix prêtres et trente-cinq gardes de Paris, sommairement jugés du haut du balcon de bois de la maison de l'horloge - dont beaucoup se souviennent - ont été fusillés là au pied d'un long mur, puis jetés dans une fosse. Le drame est notre remords : le lendemain, pour réprimer le massacre de nos frères (qui auraient à coup sûr condamné ces crimes), d'innombrables enfants du peuple de Paris, prompts au combat, à la révolte, à l'espoir, furent tués contre un autre mur proche.

Quelles que soient les options qui diffèrent et la foi d'origine diverse, fondées souvent sur un même amour de l'homme, puissent enfin s’établir sur ce sol gorgé de sang des liens fraternels qui rejettent la haine.

( . . . )

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