En Seine-et-Marne, les idées républicaines et socialistes sont très présentes à la fin du Second Empire, comme l’ont attesté les dernières consultations électorales, notamment dans les villes à forte population ouvrière et artisanale, et chez les ouvriers agricoles durement exploités par les grands propriétaires terriens.

 

Au moment de la Commune, le département est occupé par les Allemands à l’exception de ses rares communes situées sur la rive gauche de la Seine. La présence de l’occupant et la surveillance des agents de l’autorité versaillaise gênent les communications avec Paris. Cela n’empêche pas les écrits de la Commune d’arriver jusqu’à la population, comme en témoignent les rapports des autorités préfectorales cités ci-dessous, en italique :

« On en trouvait partout, dans les rues et jusque dans les champs  ».

Pour assurer cette diffusion le train est très largement utilisé :

« Des émissaires jetaient au vent, par les portières des wagons, une quantité de proclamations aux travailleurs des champs ».

Le préfet signale au gouvernement « le personnel presque entier de la gare de Montereau », notamment le chef de gare réputé comme « l’un des chefs occultes du parti démagogique  ». Le préfet requiert le déplacement du commissaire de la surveillance administrative à la gare de Montereau « que la notoriété publique désigne comme un partisan ardent de la Commune dont il approuvait hautement les actes ».

Vue de Montereau, carte postale début du XXe siècle
Vue de Montereau, carte postale début du XXe siècle

 

Le sous-préfet de Meaux signale l’action des « femmes de mauvaise vie, mais fort bien mises, qui cachaient sous leurs jupes les placards et les collaient pendant la nuit  ». Le style de ce fonctionnaire, pour tenter de salir les femmes qui agissent en faveur de la Commune, laisse supposer sa lecture de la presse versaillaise.

Un rapport de gendarmerie signale le passage d’un aérostat qui distribue des proclamations « des travailleurs de Paris aux travailleurs des champs ». Le sous-préfet de Fontainebleau signale la présence d’un « individu » soupçonné de recruter des volontaires pour aller combattre aux côtés des insurgés parisiens. Le préfet analyse cette situation :

« On sait quelles sont en général leurs tendances et à quel point les idées socialistes ont fait des progrès parmi eux… Plus on se rapproche de Paris et plus on trouve ces idées enracinées  ».

Brève Commune à Montereau.

Le 10 avril 1871, une manifestation a lieu à Montereau au cours de laquelle on plante un arbre de la liberté surmonté d’un drapeau rouge. Les manifestants pillent une armurerie et occupent la gendarmerie. Maîtres de la ville, ils font sonner le tocsin toute la nuit. Le lendemain, l’arrivée de nombreux escadrons de gendarmerie incite les insurgés à restituer le pouvoir aux autorités préfectorales.

Sans atteindre l’importance de celle de Montereau, d’autres manifestations en faveur de la Commune de Paris ont lieu à Coulommiers, Souppes, Château-Landon et Nemours. La situation de la Seine-et-Marne pendant la Commune peut être résumée dans les propos du sous-préfet de Meaux qui estime que :

« tous les gens du désordre attendaient l’heure et étaient prêts à marcher, mais devant les baïonnettes prussiennes, nul n’a bougé ».

Dans son langage administratif, ce fonctionnaire versaillais atteste qu’une partie importante de la population de Seine-et-Marne était acquise aux idées de la Commune.

YVES LENOIR

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