Dès la Semaine sanglante, plusieurs dizaines de milliers de Parisiens et de Parisiennes, gardes nationaux ou non, furent raflés pour leur participation supposée à l’insurrection.
Plus de 10 000 hommes et enfants furent amenés dans des conditions inhumaines en wagons à bestiaux plombés en direction de Brest et furent jetés sur des bateaux-prisons. Les deux tiers firent l’objet de non-lieux faute de preuves.
Parmi ces « insurgés » ayant été libérés, trois frères, fils de l’inspecteur de police Jules Émile Houlié dont l’histoire a peut-être inspiré le personnage de Houillé qu’on aperçoit dans le roman Le cri du peuple de Jean Vautrin.
Jules Émile Houlié naît le 1er juin 1824 à Honfleur. Il se marie avec Émilie Louise Gamard, le 21 septembre 1847, dans la même ville. Ils auront huit enfants. En 1850, la famille Houlié s’installe au nord de Paris.
Jules Émile est fait prisonnier comme un million d’autres soldats lors de la déroute de Napoléon III à Sedan. Après la Commune, Jules Émile sera muté à deux reprises puis révoqué en juin 1875. Du fait de cette révocation, il perd son droit à la retraite : la famille vivra dans la misère. Il meurt le 6 décembre 1891 à Paris 10e arrondissement. Son dossier, non consultable aux archives de la police dans les années 1990, a mystérieusement disparu.
Trois de ses fils seront détenus jusqu’en octobre 1871 sur les pontons-prisons brestois et seront ensuite relâchés faute de preuve, pour « non-lieu ».
Émile Houlié naît le 21 novembre 1848 à Ingouville (Seine-Inférieure). Émile est arrêté fin mai 1871. Détenu sur le ponton Le Breslaw (baie du Fret), un non-lieu lui est accordé le 8 octobre 1871. Il est libéré deux semaines après, le 22 octobre après 5 mois de captivité.
Il se marie le 10 janvier 1874 à Paris avec Catherine Koehl. Il décède à Nanterre le 22 mars 1903 à l’âge de 55 ans. Son acte de décès précise « profession mécanicien ».
Sur le Breslaw, le climat est à l'hystérie générale et à la répression sans limite. Tout militaire qui marquerait un signe d'humanité envers ces insurgés se verrait complice et passé par les armes. Lissagaray, dans son Histoire de la Commune de 1871, écrit : « le capitaine d’armes du Breslaw les traitait en forçats ».
Albert Houlié naît au Havre (Seine-Inférieure) le 1er mai 1853. Détenu sur le ponton Le Ville-de-Bordeaux (baie de Trébéron), un non-lieu lui est accordé le 23 octobre 1871.
Il a 44 ans lorsqu’il décède à Paris 17e, le 19 décembre 1897. Son acte de décès précise « profession menuisier ».
Amand Houlié naît le 15 février 1856 à Paris (6e arrondissement). Il a quinze ans lors de son arrestation le 31 mai 1871. Il est, avec son frère, également détenu sur le ponton Le Ville-de-Bordeaux. Sa fiche carcérale précise « profession menuisier ». Un non-lieu lui a été accordé le 30 septembre 1871. Il est libéré le 11 octobre 1871 après 4 mois et demi de détention. Il a 49 ans lorsqu’il décède à l’hôpital Ambroise Paré, le 13 janvier 1905.
L’écrivain Arthur Monnanteuil, auteur de « Neuf mois de ponton, paroles d’un détenu » a lui aussi été détenu sur un ponton : le Ville-de-Lyon. Il décrit les conditions de détention sur ce ponton et note que :
« Le Ville-de-Bordeaux était avec le Napoléon et l’Austerlitz un des pontons où l’on traitait les prisonniers avec une injustice criante et souvent barbare ».
« Sur ces navires, ajoutait Monnanteuil, la mortalité était bien plus considérable que sur les autres pontons ».
DANIEL HOULIÉ Arrière-petit-fils d’Amand Houlié
DENIS ORJOL Comité Trégor-Argoat