Édouard Vaillant est né à Vierzon dans le département du Cher le 26 janvier 1840 au sein d’une famille aisée. Son père, notaire et homme d’affaires se préoccupe peu de son éducation. Sa mère, très croyante, le soutiendra toujours dans les difficultés de la vie, malgré les affirmations révolutionnaires et l’athéisme de son fils.
Celui-ci a deux ans lorsque sa famille va habiter à Paris. Interne au Collège Sainte Barbe, il y obtient le baccalauréat en 1857. Etudiant à l’Ecole centrale, il en sort ingénieur des Arts et Manufactures en 1862. Il complète sa formation scientifique en Sorbonne, au Collège de France et au Muséum d’Histoire naturelle ; il est reçu docteur ès sciences en 1865. Il soutient une thèse de doctorat à l’École de médecine.
C’est probablement de cette période que datent ses doutes au sujet de la religion catholique et ses aspirations à la justice sociale. En 1866, il se rend Outre-Rhin dans le but d’étudier la chimie. Il se passionne surtout pour la philosophie dans les universités d’Heidelberg, Tübingen et Vienne. Sur le plan philosophique, il évolue du proudhonisme au socialisme révolutionnaire d’inspiration blanquiste et adhère à la section allemande de Genève de l’Internationale. Son séjour Outre-Rhin est entrecoupé de visites en France où il fréquente les futurs communards Longuet, Pyat et Vallès.
Insurgé le 4 septembre 1870
Revenu en France au moment de la guerre franco-prussienne, il participe à l’insurrection du 4 septembre 1870 qui aboutit à la proclamation de la IIIe République. Dès le 5 septembre, il est l’un des délégués des comités de vigilance qui forment le Comité central républicain des vingt arrondissements lequel se réunit rue de la Corderie, le siège parisien de l’Internationale. Profondément patriote, Édouard Vaillant s’engage dans le 88e bataillon d’artillerie de la Garde nationale. Il est hostile à toute capitulation devant les Prussiens qui encerclent Paris à partir du 18 septembre. Il participe à la journée révolutionnaire du 31 octobre. Le 5 janvier 1871, il est l’un des rédacteurs de la déclaration des délégués des vingt arrondissements, connue sous le nom d’Affiche rouge, qui dénonce l’incapacité et la trahison du gouvernement dit « de défense nationale », et se termine par le célèbre mot d’ordre : Place au peuple !
Place à la Commune. Il manifeste pour cet objectif le 22 janvier 1871, devant l’Hôtel de Ville de Paris. La capitulation ayant été signée le 28 janvier 1871, Édouard Vaillant est l’un des promoteurs de la réunion générale de la Garde nationale du 6 février convoquée en vue de préparer les élections législatives du 8 février. Il est candidat sur la liste présentée par les Chambres fédérales ouvrières, l’Internationale et la délégation des vingt arrondissements, mais il ne figure pas au nombre des quatre élus parisiens de cette liste. La réunion de la Garde nationale du 6 février a des prolongements qui aboutissent à la création du Comité central le 15 mars, lequel sera en mesure de prendre le pouvoir au soir du 18 mars, après l’insurrection populaire parisienne.
LES 72 JOURS DE LA COMMUNE
Le 18 mars 1871, Édouard Vaillant est absent de Paris ; il se trouve à Bordeaux où il est venu rencontrer Auguste Blanqui dans le but de ranimer la défense nationale. De retour à Paris le 20 mars, il participe activement au mouvement révolutionnaire. Élu à la Commune dans le VIIIe arrondissement, il va y jouer un rôle déterminant.
Aussitôt après sa proclamation, le 28 mars, la Commune met en place dix commissions de travail coordonnées par une Commission exécutive. Édouard Vaillant est membre de cette commission exécutive et le restera jusqu’à la fin de la Commune.
Il est nommé gérant du Journal Officiel de la Commune qui paraît tous les jours, du 24 mars au 24 mai 1871. Édouard Vaillant va vivre tous les débats de l’assemblée communale. Il est assidu à ses réunions et s’y fait remarquer par le bon sens de ses propos et ses interventions modératrices dans les débats, parfois vifs, qui agitent l’assemblée.
Il figure parmi les rédacteurs de ses grandes proclamations. Il soutient en particulier les propositions de la Commission du Travail qui visent à améliorer les conditions de vie des ouvrières et ouvriers et à accroître leurs ressources, notamment le décret du 16 avril qui prévoit la remise en marche, sous forme coopérative, des ateliers abandonnés par leurs propriétaires.
Délégué à l’enseignement de la commune
Nommé délégué à l’Enseignement le 21 avril 1871, Édouard Vaillant donne une impulsion significative à la commission du même nom. Dans le prolongement du décret du 2 avril de séparation de l’Église et de l’État, il intervient auprès des élus de la Commune pour qu’ils transforment, dans leurs arrondissements d’élection, les écoles congréganistes en établissements d’enseignement laïcs. Il jette les bases d’un enseignement professionnel pour les garçons et les filles en faisant appel à « toutes les personnes qui ont étudié la question de l’enseignement intégral et professionnel » afin de solliciter leurs suggestions.
À la commission de l’Enseignement, il travaille en étroite collaboration avec les organisations d’Education populaire comme la Société de l’Education nouvelle qui préconise une large réforme des programmes en y favorisant l’étude des sciences et de l’expérience. Dans ce but, il lance un appel, dans le Journal Officiel aux ouvriers de plus de 40 ans pour qu’ils deviennent maîtres d’apprentissage. La Commune, avec sa Commission de l’Enseignement et son délégué Édouard Vaillant, a ainsi jeté les bases de l’école laïque, gratuite et obligatoire.
Pendant la Semaine sanglante, du 21 au 28 mai 1871, Édouard Vaillant fait partie des derniers dirigeants de la Commune qui se réunissent à l’Hôtel de Ville, puis à la mairie du XIe arrondissement et enfin rue Haxo, dans le XXe. Le dernier jour de la Commune, il fait le coup de feu contre les versaillais. Les jours suivants, des amis le cachent et il parvient à échapper à la répression en se réfugiant à Londres où il milite dans l’Internationale puis dans les milieux blanquistes.
Le 17 juillet 1872, le 3e conseil de guerre l’avait condamné à mort par contumace. Édouard Vaillant revient à Paris quelques jours après la loi d’amnistie du 11 juillet 1880 et reprend son activité politique, d’abord dans le Cher où il est candidat à plusieurs élections sous les couleurs du Comité Révolutionnaire Central, de tendance blanquiste, qui donnera naissance au Parti Socialiste Révolutionnaire (PSR).
En 1905, il est l’un des artisans de l’unification des socialistes au sein de la SFIO. Il combat contre la guerre aux cotés de Jaurès avant de se rallier à l’Union sacrée.
Édouard Vaillant a été élu conseiller municipal, puis député de Paris dans le XXe arrondissement.
Dans ces assemblées, jusqu’à sa mort en 1915, il s’efforce de mettre en oeuvre les idéaux de la Commune dont il avait été l’un des plus actifs participants.
Yves Lenoir
Édouard Vaillant en 1908, devant la plaque "Aux morts de la Commune" au Mur des Fédéré dans le cimetère du Père-Lachaise
Sources:
Maitron, Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier, éditions de l’Atelier.
Maurice Dommanget, Édouard Vaillant, un grand socialiste, la Table ronde, 1956.
L’enseignement, l’enfance et la culture sous la Commune, éditions de l’Étoile, 1964.
Journal officiel de la Commune, Ressouvenances, 1977.