BENOÎT MALON - LA TROISIÈME DÉFAITE DU PROLÉTARIAT FRANÇAIS
Membre de la Commune, élu du 17e arrondissement et membre de l’Internationale, Benoît Malon livre ses souvenirs à chaud, lorsqu’il se réfugie en Suisse après la défaite de la Commune de Paris. Le livre est une réimpression, en 1968, de sa version originale qui fut publiée par G. Guillaume fils, à Neuchâtel, en 1871.
L’auteur donne comme titre à son œuvre La Troisième Défaite du Prolétariat français, les deux défaites précédentes étant l’écrasement du soulèvement du mouvement ouvrier à Lyon en 1832 et le bain de sang des insurgés de Juin 1848. Le but recherché par l’auteur est clairement exprimé dans les pages «Préliminaire», au début du livre : «Il essaiera de dire ce qu’a été, ce qu’a fait, ce qu’a voulu la Commune de 1871 ; mais il dira aussi ce que sont, ce qu’ont fait, ce que veulent ses implacables ennemis». Les 500 pages suivantes offrent un bel exemple de l’accomplissement de cette tâche.
En tant que témoin direct des 72 jours héroïques et tragiques que dura la Commune de Paris, il raconte son récit émotionnel avec une lucidité et une clarté remarquables. Il atteint son but en citant abondamment non seulement les journaux soutenant la Commune, mais aussi des journaux versaillais. On trouve aussi des récits de témoins oculaires : « Un soldat à Batignolles, las de tuer, refuse de fusiller des femmes et des enfants inoffensifs ; il est mis à mort immédiatement sur l’ordre de l’officier. Dans le même arrondissement, on a vu un homme qui n’a pris aucune part à la lutte, entraîné aux yeux de sa femme (comme il sortait pour se procurer un peu de nourriture dans sa famille) par une soldatesque ivre de sang ; sa femme accourt, un enfant dans les bras, pour protester de son innocence ; on n’écoute rien, et comme elle tenait son mari étroitement embrassé et qu’il aurait été trop long de les détacher, on fusille homme, femme et enfant. M. Izquierdo, docteur médecin, se précipite pour donner des soins à l’enfant qui respire encore ; il est saisi et fusillé à son tour ».
Arif Mardin
Benoît Malon, La Troisième Défaite du Prolétariat français, G. Guillaume fils éditeur, 1871, Neuchàtel. (Lire ou télécharger sur Gallica -BNF)
JUSTICE ! PAR UN OFFICIER D’ARTILLERIE DE L’ARMÉE DE PARIS EN 1871
Ce petit livre, écrit par l’intendant du général Rossel, a été publié à Londres postérieurement aux événements tragiques de la Commune de Paris. Il a été justement réédité car c’est un document rappelant «très simplement et très crûment» certains des crimes commis dans le but de mâter la révolution populaire de 1871. On y voit comment les Communards, recherchés, martyrisés et exterminés, vont se débattre sans perspective de justice ni de salut ; et les exemples illustrant cet épisode navrant de notre histoire y sont révélés avec une totale absence de mise en scène. Brut de fonderie. N’y cherchez pas, non plus, une mise en perspective argumentée.
Il s’agit plutôt d’une séried’instantanés concernant un moment de notre histoire qui provoque l’émotion et l’indignation. Vous y retrouverez toute la vilenie du gouvernement d’Adolphe Thiers et des troupes versaillaises. De quoi alimenter, si c’était nécessaire, notre contestation à l’ordre tels que le conçoivent les tyrans et les militaires faisant carrière dans leur sillage. Et notre fidélité à l’esprit de résistance.
Claude Chanaud
Justice ! par un officier dartillerie de l'armée de Paris, Imprimerie internationale, Londres, 1871. (Lire ou télécharger sur Gallica - BNF)
LE JOURNAL DE LA COMMUNE
Le livre prend date dans l’illustration d’une révolution en images. L’auteur se plonge dans la lecture du Journal Officiel de la Commune de Paris. Comme le suggère le préfacier Jean-Marie Borzeix, le JO recense les actes et les décrets de l’administration parisienne, relate quotidiennement le scénario de la révolution en marche et mêle faits politiques et anecdotiques, c’est-à-dire donne aux oubliés de l’histoire de France le droit à la parole, l’exposé des projets, la promulgation des décrets et la description des premières réalisations de la Commune.
La technique d’Eloi Valat n’est pas préméditée car elle est induite par le but du dessinateur : trait chirurgical direct parfois brisé en raison de la double attitude objective et intersubjective vis-àvis du corps social et politique représenté. La couleur est vive, charnelle pour rendre compte d’une circulation à fleur de peau avec aplats, afin d’éliminer toute sensiblerie du détail. En résumé c’est une vision d’une révolution au quotidien, d’un arrêt sur images de la vie d’un peuple. La Commune n’a pas fini de nous étonner par sa modernité, étouffée qu’elle est par le défilé permanent des réactionnaires de tout poil dont le but est de conserver une histoire favorable à leurs intérêts.
PHILIPPE LEPAULARD
Éloi Valat, Le journal de la Commune, Éditions Bleu Autour & Paris-bibliothèques, 24 E
De son côté, notre adhérent, Xavier Lemaître, nous donne son opinion sur ce livre. Soixante-neuf illustrations animent autant de chroniques du JO de la Commune. Les commentaires sont édifiants, les notes claires, le trait énergique, la couleur vive et le sang chaud. Cet ouvrage est publié à la suite de l’exposition, « le Journal de la Commune. Dessins inédits d’Eloi Valat », présentée à la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris en mars 2007.
MONTMARTRE DE LA REPUBLIQUE A LA COMMUNE
Gérald Dittmar décrit parfaitement l’atmosphère enfiévrée qui régnait dans Montmartre, du premier Siège à la Commune.
Avec lui, nous pénétrons dans les nombreux clubs qui s’échelonnaient sur les flancs de la Butte. Gérald Dittmar admire Louise Michel, présidente du Comité de vigilance des citoyennes du XVIIIe arrondissement, la figure la plus populaire de ce site encore agreste. Elle a de bonnes relations avec le maire Clemenceau et défend énergiquement la République auprès des enseignants des établissements religieux. Le 18 mars 1871, elle est au premier plan des combattants pour la liberté, souligne l’auteur.
Ayant procédé à une minutieuse recherche dans les archives de l’armée, Gérald Dittmar a pu établir un relevé détaillé de tous les bataillons fédérés de Montmartre. La répression dans le XVIIIe arrondissement fut épouvantable et Gérald Dittmar a raison de rappeler les atrocités accomplies par la prévôté de la rue des Rosiers et les tortures infligées à Varlin.
MARCEL CERF
Gérald Dittmar, Montmartre de la republique à la Commune, Éditions Dittmar, 300 pages : 30 E
GUSTAVE COURBET ET LA COMMUNE — LE POLITIQUE
En intitulant son livre Gustave Courbet et la Commune — le politique, Gérald Dittmar n’a pas voulu dire que, chez le peintre, la création artistique était nettement séparée de la lutte sociale et de l’action politique. Mais l’oeuvre picturale de Courbet ayant donné lieu à la publication de nombreux ouvrages, il a estimé que l’homme politique n’ayant jamais été étudié ou si peu, il devenait nécessaire de réparer cet oubli.
Le 18 mars 1871 commence une ère nouvelle. Courbet est déjà lancé dans la bagarre. Il ne peint plus guère. Dans ses lettres aux artistes des 6 et 7 avril 1871, il développe ses projets et des quantités d’idées nouvelles. Pour lui, la révolution est d’autant plus équitable qu’elle part du peuple.
Le 13 avril, les artistes de Paris se constituent en fédération. Courbet est élu président. Il sera confirmé dans ses fonctions le 17 avril. Il est élu membre de la Commune aux élections complémentaires du 16 avril (le décret de démolition de la colonne Vendôme date du 12 avril ; Courbet n’a donc pu prendre part au vote de ce décret).
Courbet est arrêté le 7 juin. Le 2 septembre, il est condamné à six mois de prison et 500 Fr. d’amende. Il purgera sa peine à l’orangerie du château de Versailles transformée en prison, puis à Sainte Pélagie.
Grâce à Gérald Dittmar, nous pouvons lire la relation intégrale du procès, les questions insidieuses des juges et les réponses fermes et précises de Courbet
L’élection de Mac-Mahon à la présidence de la République le 24 mai 1873 aura des conséquences néfastes sur le destin de Courbet. Le 24 mai 1877, le tribunal civil de la Seine décide que Courbet doit s’acquitter des frais de restauration de la colonne, soit 323 091,68 Fr. Gravement malade et ruiné par la haine de la clique réactionnaire au pouvoir en France, Courbet meurt dans la nuit du 31 décembre 1877 à la Tourde-Peilz (Suisse) où il s’était réfugié. Les obsèques civiles auront lieu le 3 janvier en présence d’une foule immense.
MARCEL CERF
Gérald Dittmar, Gustave Courbet et la Commune — Le politique, Éditions Dittmar, 450 pages : 35 E