Un de nos adhérents des Pays de Loire, Patrick Fonteneau, nous a adressé deux textes
d’Eugène Bizeau, poète vigneron et chansonnier anarchiste, né le 29 mai 1883 à Veretz (37) et mort le 16 avril 1989 à Tours (37), qui collabora à de nombreux périodiques et journaux anarchistes de son époque et appartint au groupe de la Muse Rouge.
Le premier est un poème extrait des Lueurs crépusculaires (Poèmes, 1985) et le second est une chanson (musique de G. Isabelli) extrait d’Eugène Bizeau a cent ans, édition Christian Pirot.
Les voici.

La tristesse du poète devant le Mur des Fédérés…

« Un seul être nous manque et tout est dépeuplé… »

Quand la mort implacable a frappé de ses coups
Ceux dont le sort cruel nous blesse et nous chagrine,
Comme ils sont émouvants ces vers de Lamartine…
Et quelle résonance ils ont alors en nous !

Avril peut nous offrir la rose et l’églantine,
Le soleil peut briller comme aux jours les plus doux :
Le poète est penché sur le sol qu’il piétine
Et pense aux êtres chers qui sont couchés dessous…

Le cœur plein d’amertume et de mélancolie,
Il pense aux oubliés dont la terre est remplie,
Qui sont allés trop tôt se perdre au dernier port…

Et sa grande pitié, vibrante et fraternelle,
Par-dessus les tombeaux couronnés d’immortelles
Souffre et pleure en silence au souvenir des morts.

Devant le Mur des Fédérés
Un songe amer étreint mon âme
Et jette une ombre sur la flamme
Dont les martyrs sont éclairés.

C’est là, tombant jusqu’au dernier,
Héros sans nom d’un sombre drame,
Qu’ils ont grossi l’affreux charnier
Dans la terreur d’un jour infâme…

C’est là que Thiers et Gallifet,
Pour le bonheur des satisfaits
Ont assassiné la Commune…

Mais l’idéal des révoltés
Fait briller sur leur infortune
Un rayon d’immortalité !

 

Commune, espoir du monde 

Aux premiers jours d’un printemps sombre
Où les canons crachaient du feu,
Se sont levés des gueux sans nombre
Qui ne voulaient ni roi ni dieu…
Ils ont lutté contre Versailles
Dont les obus criblaient Paris,
Puis ils sont morts sous la mitraille,
Assassinés par des bandits !

Refrain

Commune, espoir du monde,
Sous les toits des faubourgs,
Plus forte et plus féconde
Tu renaîtras un jour !

Petits enfants, vieillards et femmes,
Combien sont-ils de massacrés
Dont nous sentons frémir les âmes
Devant le Mur des Fédérés ?
Au pays noir des spectres blêmes,
Martyrs sans nom, combien sont-ils,
Ceux dont le sang rougit l’emblème
Qui fit trembler leurs bourreaux vils ?

Au refrain

Malgré les soirs d’âpre infortune,
Les trahisons et les rancœurs,
Le souvenir de la Commune
Reste vivant dans tous les cœurs
Salut, Commune ! Enfant martyre
Des grands lutteurs des temps passés ;
Et que maudits soient les vampires
Pour tout le sang qu’ils ont versé !

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