Le 19 juillet 1870, Napoléon III déclare la guerre à la Prusse. Rapidement le conflit tourne à la catastrophe pour la France. L’armée de Bazaine s’enferme dans Metz. Celle de Mac Mahon se rend à Sedan le 2 septembre et Napoléon III est fait prisonnier. Deux jours après, Paris s’insurge et la Troisième République est proclamée avec la formation d’un gouvernement de Défense nationale qui décide de continuer la guerre. Fin septembre, Paris est encerclé par l’armée allemande. Léon Gambetta (1838-1882), ministre de la Guerre, organise depuis Tours l’armée de la Loire qui doit délivrer Paris. Devant la menace allemande, il est créé une armée des Vosges à partir de francs-tireurs, de mobiles, de volontaires étrangers dont beaucoup d’Italiens.

Le plus célèbre est Giuseppe Garibaldi.

Giuseppe Garibaldi (1807-1882) vers 1861 (Source : Library of Congres)
Giuseppe Garibaldi (1807-1882) vers 1861 (Source : Library of Congres)

Né à Nice le 4 juillet 1807, Garibaldi fut tour à tour artisan de l’unité italienne, corsaire au service de la République du Rio Grande et guérillero en Uruguay, d’où son surnom de « héros des Deux-Mondes ». Après le désastre de Sedan, le 2 septembre 1870, le chef des Chemises rouges, âgé de soixante-trois ans, quitte sa petite île de Caprera au large de la Sardaigne, pour combattre les Prussiens.

Je viens donner à la France, ce qu’il reste de moi.

Début octobre, Gambetta lui offre le commande­ment de cette nouvelle armée des Vosges qui sera rapidement dénommée « armée Garibaldi » et qui compte 4000 hommes, mal armés et mal équipés, sans artillerie ni cavalerie. Le 31 octobre, les troupes allemandes investissent Dijon. Le 27, l’armée française du général Bazaine a déposé les armes à Metz.

Le 9 novembre, l’armée des Vosges se déplace à Autun. Garibaldi organise l’armée en quatre bri­gades sous le commandement de ses deux fils, Ricciotti (1847-1924) et Menotti (1840-1903), de son gendre Stefano Canzio (1837-1909), et du Polonais Jozef Bossak-Hauké (1834-1871), géné­ral qui s’est distingué lors du soulèvement de 1863.

Garibaldi, sachant que son armée n’est pas encore de taille pour affronter les troupes alle­mandes, organise des opérations de guérilla. Il décide alors d’organiser un raid sur Dijon le 26 novembre. Les garibaldiens bousculent les avant-postes allemands, mais l’attaque échoue et ils doivent se replier sur Autun. Les Allemands attaquent Autun le 1er décembre, mais devant la résistance des garibaldiens, l’attaque est stoppée et l’ennemi se replie sur Dijon.

Du 21 au 23 janvier, les Allemands attaquent Dijon. Pendant trois jours, les combats sont vio­lents, les garibaldiens se défendant âprement. Le 21, le général Bossack est tué et la moitié de ses hommes sont hors de combat. Le 23, la dernière attaque allemande est stoppée et les soldats poméraniens abandonnent le terrain et le drapeau de leur régiment. Les Allemands battent alors en retraite en direction de Langres. Cette bataille est l’une des rares victoires françaises de la guerre de 1870.

Garibaldi est « le seul général ayant combattu pour la France, qui n’ait pas été vaincu » (Victor Hugo). Cette campagne des Vosges est l’ultime combat armé de ce chef de guerre.

Garibaldi à la bataille de dijon 21-23 janvier 1871 - Anonyme, lithographie, colorié (CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris)
Garibaldi à la bataille de dijon 21-23 janvier 1871 - Anonyme, lithographie, colorié (CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris)

Le 10 mars, le corps des volon­taires garibaldiens est dissous. Le 24 mars, les insurgés de la Commune de Paris font appel à lui pour prendre la tête de la Garde nationale de Paris mais il décline la proposition. Il prend cependant position pour la Commune de Paris au nom de la justice et de la dignité humaine, contre le triple despotisme des monarchies, des prêtres et des pri­vilèges mais Il n’y participe pas directement.

En revanche, il incite ses compagnons d’armes à rejoindre la Commune de Paris, à commencer par son fils Menotti tout en précisant :

Si cela est une question entre Français, ne t’en mêle pas.

Menotti fut pourtant élu délégué pour le XIXe arrondissement et Ricciotti se trouvait à Lyon lors de l’insurrection de la ville.

Les sentiments des garibaldiens pour la justice et la liberté les ont amenés à soutenir la Commune de Paris. Plusieurs d’entre eux s’illustrèrent dans ses rangs, parmi lesquels :

L’ouvrier mécanicien Adolphe Assi (1841-1886), membre élu de la Commune, fut nommé gouverneur de l’Hôtel de Ville de Paris. L’histoire des chemises rouges retient aussi le nom d’Amilcare Cipriani (1844-1918), vétéran des campagnes garibaldiennes. Aide de camp de Jules Bergeret (1831-1905), il joue un rôle de pre­mier plan au cours de la première période de la Commune, tant militaire que politique. Il est capturé le 2 avril et condamné à mort. Il échappe à l’exécution et est déporté en Nouvelle-Calédonie en mai 1872. De retour en France, il sera embauché par Jaurès à l’Humanité comme pigiste.

Stefano Canzio (1837-1909), gendre de Garibaldi, rencontre celui-ci à Caprera en 1867 et le suit en France en 1870. À Dijon, il se comporte en héros et après la mort de Josef Bossak-Hauké, il prend le com­mandement de la première et dernière brigade réunies. Il rentre de France avec le grade de colonel-brigadier et Garibaldi le fait élever au grade de général de l’ar­mée des volontaires.

Enrico Magherini (1847-1907), né à Florence, se rallia à l’Internationale et vint à Paris pendant le Siège où il participa à la Légion italienne avant d’être élu lieutenant dans la 4e compagnie du 238e bataillon de la Garde nationale. Il participa à la Commune comme lieutenant dans la 2e compagnie de la Légion italienne.

Aimable Humbert, dit le Garibaldien (1812- ?) lieutenant puis capitaine au 103e bataillon fédéré, fut condamné par contumace le 13 août 1874 par le 4e conseil de guerre aux travaux forcés à perpé­tuité.

Jean Defendi, dit Giovanni (1849-1925), com­munard et militant anarchiste italien qui, après avoir servi dans la Légion garibaldienne durant la guerre franco-prussienne, est arrêté après l’écrase­ment de la Commune et condamné le 27 avril 1872 à 15 ans de détention pour sa participation au mouvement communard. Il est envoyé à la prison de Belle-Île où sa peine est commuée en 1879 en bannissement perpétuel. Il gagne l’Angleterre où il rejoint un groupe de communards exilés.

Carlo Piazza (1834-1881), militaire de carrière et lieutenant dans le 8e régiment de Toscane, s’en­gage en 1870 dans les chasseurs des Alpes de l’Armée des Vosges. Démobilisé, il arrive à Paris le 15 avril et s’engage dans la 1ère division de cavalerie fédérée. Condamné à la déportation en Nouvelle-Calédonie, il obtient une remise de sa peine le 20 mars 1879 et rentra par le Var. Il se suicide le 7 août 1881 à Paris.

Pier Luigi Savio (1837-?), a participé dans l’ar­mée du Piémont à partir de 1859 aux campagnes pour l’indépendance nationale jusqu’en 1866. Il s’installe ensuite à Paris et au début d’avril 1871, il est l’un des premiers à s’engager dans la Légion italienne. Il participe à la sortie de Vanves. Condamné par contumace, le 31 décembre 1873, à la déportation, il se réfugie à Londres, et rentre en Italie peu après.

Lucien Combatz (1835- ?), citoyen piémontais qui, dès 1866, rejoint Garibaldi et combat dans le Tyrol ita­lien. Puis, il débarque avec le corps garibaldien à Héraklion pour aider les insurgés crétois contre les Ottomans. Il arrive en France au début de la guerre franco-prussienne. Il rejoint naturellement la Commune et, en tant qu’officier des transmissions, il est nommé le 19 mars 1871 directeur des télégraphes de la Commune. Après la défaite de la Commune, il réussit à fuir. Le 16 décembre 1872, le 6e conseil de guerre le condamna par contumace à la déportation dans une enceinte fortifiée.

Quant à Garibaldi, sans salaire ni pension, il passe ses dernières années à Caprera et se remet à l’écriture. Émus par sa situation précaire, ses amis le pressent d’accepter des subsides amplement mérités jusqu’au jour où, enfin, il va accepter une pension du gouver­nement italien. Il meurt le 2 juin 1882.

Victor Hugo écrit :

ce n’est pas l’Italie qui est en deuil, ce n’est pas la France, c’est l’humanité.

RÉMI SCHERER

 

Sources principales :

Rémy Sherer, L’artillerie de l’armée Garibaldi. Octobre 1870 – Janvier 1871, en autoédition sur Calaméo.

Général Cremer et Colonel Poullet, La campagne de l’Est et de l’armée Bourbaki. Librairie des célébrités contemporaines, 1874.

Général Bordone, Garibaldi et l’armée des Vosges. Armand le Chevalier éditeur, 1873.

Lieutenant-colonel de Coynart, La guerre à Dijon, 1870-1871. Paris, Librairie militaire Dumaine, 1873.

Ricciotti Garibaldi, Souvenirs de la campagne de France 1870-1871. Imprimerie des Alpes Maritimes, 1899.

Grenest, L’armée de l’Est. Relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. Garnier Frères, 1895.

Robert Middleton, Garibaldi, ses opérations à l’ar­mée des Vosges. Garnier Frères, 1872.

Lieutenant-colonel Rousset, Histoire générale de la guerre franco-allemande. Les armées de province. Édition Tallandier, 1895-1898.

John Sutton, « Garibaldi, combattant de la Liberté », La Commune, n°54, 2013 p.30.

Le Maitron : www.maitron.fr

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